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Coca Cola et Pepsi Cola vue par l’Inde

 

Les etats-Unis ont menacé l’Inde, après avoir interdit la commercialisation du Coca Cola et Pepsi

En août 2006, l’État de Kerala dans le Sud de l’Inde a interdit la production et la commercialisation du Coca Cola et de Pepsi Cola sur son territoire. Cette décision a été prise à la suite d’analyse d’un laboratoire, qui démontre que les boissons en cause contiennent des pesticides en grande quantité et représentent un risque dangereux, tant pour la santé de ceux qui les consomment que sur l’environnement.

Cinq autres provinces indiennes ont interdit ensuite la production du Coca Cola et de Pepsi Cola et sa commercialisation surtout dans les écoles, les hôpitaux et les universités. Ces mesures ont mis en sérieuse difficulté les deux compagnies, qui détiennent 80% du marché indien des boissons rafraîchissantes (gazeuses), les pertes étant estimées à des milliards de dollars. Toutefois, elles représentent un sérieux coup pour l’image de Coca Cola et de Pepsi Cola.

Les deux sociétés américaines se sont trouvées deux fois dans cette situation. Le gouvernement Indien avait interdit ces deux produits en 1977, après avoir solliciter aux compagnies de rendre publique la composition de leurs produits pour sa fabrication, pour prouver qu’ils ne sont pas nocifs. Les compagnies ont refusées de le faire pour la raison que les recettes sont secrètes.

Les analyses de laboratoire ont été réalisées par une association indépendante, le Centre pour la science et de l’environnement (CSE) confirme eux aussi ces résultats du rapport des autorités sanitaires vétérinaires de New Delhi. Les deux montrent que les boissons en cause contiennent une quantité illégale des pesticides, de 20 jusqu'à 200 fois plus grand que les limites admises.

« Si on les boit, il faudrait que l’on puisse aussi les tester », c’est l’égide sous lesquelles se sont déroulées les recherches du CSE. Coca Cola a contesté les résultats, apportant la preuve que des analyses ont été effectuées par un laboratoire anglais qui certifie habituellement les produits. Le CSE montre cependant que ce n’est pas une source objective : « le fait qu’un seul laboratoire de Grand Bretagne à le droit d’analyser ce produit est douteux. Comment peut il être considéré qu’une analyse financière et de plus contrôlé par Coca Cola soit une source fiable d’information ? Les échantillons étudiés sont envoyés par Coca Cola, alors que nous avons utilisé des échantillons provenant d’une boisson du commerce et nous avons respecté toutes les normes et les protocoles d’analyse, comme nous faisons depuis 20 ans que nous travaillons. »

Coca Cola s’est justifié maladroitement. « Le cola que l’on boit en Inde est aussi propre que le Cola que l’on boit à Paris », a déclaré Kenth Kaerhoeg, directeur de communication de Coca Cola pour la zone Asie. Cette affirmation met encore plus d’huile sur le feu. Si c’est ainsi, cela signifie que le Cola que l’on boit à Paris ou dans un autre endroit contient aussi un grand nombre des pesticides.

C’est incroyable comment l’administration américaine est intervenue dans cette affaire, en faisant des pressions et en menaçant l’Inde, tandis que la presse officielle internationale s’est mobilisée et elle a présenté les deux compagnie en tant que victime d’un boycott.

Le sous-secrétaire américain du commerce internationale, Franklin Lavin, a déclaré que : « ces mesures apportent une image négative dans le milieu des affaires asiatique, l’image va être ressentie par une baisse massive des investissements américains en Inde, dans l’avenir. C’est un faux pas pour l’économie indienne. Et le moment n’était pas bien choisi, l’intérêt du gouvernement indien devrait être à maintenir à un haut niveau les investissements étrangers ». En effet, les États-Unis sont les plus grands investisseurs étrangers en Inde, mais les indiens ne voient pas de bon oeil la façon dont ces compagnies étrangères s’emparent des ressources de leur pays.

En ce qui concerne Coca Cola, il y a eu lieu de nombreuses manifestations publiques pour attirer l’attention sur les problèmes sociaux et sur l’environnement que cette compagnie crée. Une fabrique de cola consomme jusqu’à un million de litre d’eau, dans les conditions dont beaucoup de ces usines sont implantées dans des régions pauvres, dont la population souffre de manque d’eau. En plus, Coca Cola achète cette eau à un prix ridicule et la vend après sous forme de boisson rafraîchissante (gazeuse) très chère et toxique. Ces manifestations ont signalé aussi le fait que cette société prend le monopole sur les sources d’eau, les appauvrit et après elle y déverse ses déchets toxiques, sans respecter les normes environnementales.

« Les compagnies américaines ne peuvent pas se soustraire ou modifier comme ils en ont envie les normes d’exploitation des ressources naturelles, sous prétexte de faire des investissements. Nous ne pouvons pas tolérer le style de Coca Cola et de Pepsi Cola, et si le gouvernement américain veut réduire les investissements en Inde, il n’a qu'à le faire », a déclaré S. Nandal, représentant d’une organisation de l’État de Uttar Pradesh.

La même opinion de Sawai Singh, le représentant d’une association de l’État Kerala : « Peut être que vient le moment que le gouvernement américain réduise les investissements en Inde. Jusqu’à présent, il a détruit assez de sociétés indiennes. Leurs produits sont nocifs ».

« Le gouvernement américain doit laisser le gouvernement indien décider seul de ce qui est bien ou non pour les indiens. Continuer à commercialiser les produits du type Cola, après ce que l’on a prouvé par deux sources qu’il y a dans la composition des pesticides, c’est une insulte à l’adresse de notre liberté, à la démocratie et même à la souveraineté nationale », a déclaré R. Ajayan de Plachimada, un des villages affectés négativement par la présence d’une usine Coca Cola.

La façon dont les États-Unis sont intervenues s’explique par le fait que la méga-société est une des principales contributrices qui finance le parti républicain et qui soutient financièrement la campagne présidentielle pour les élections de 2004.
Comme la cour de justice de Kerala s’est lave les mains, le dernier mot dans ce cas revient à la Cour Suprême Fédérale de Justice de New Delhi. Mais elle a cédé aux pressions américaines et à l’intérêt économique.

La situation en Inde n’est pas restée sans bruit. La façon antidémocratique dont les États-Unis est intervenue, a déterminé, en 2007, les étudiants de l’université de Manchester en Grande Bretagne et de Guelph au Canada d’exiger l’interdiction des deux boissons dans leur campus.

En novembre 2006, le gouvernement de Riga en Lettonie a fait une loi pour que la commercialisation de Coca Cola et de Pepsi Cola soit interdite dans les écoles, ainsi que d’autres produits dangereux pour la santé. Cette décision a été prise malgré les pressions faites par Madelaine Albright, qui a demandé personnellement à la présidente lettone Vaira Vike-Freiberga de bloquer cette mesure.

Le ministre de la Santé de la République de la Lettonie a placé Coca Cola et Pepsi Cola parmi « les produits toxiques qui contiennent des colorants et des substances artificielles et ils peuvent provoquer des réactions allergiques. » « Les organismes des enfants sont très sensibles au contact des produits chimiques » a montré un communiqué.

Par Mihai Vasilescu

YOGAESO 

L'eau pompee de CocaCola

 

A Bombay, Coca-Cola est érigée en symbole de ces multinationales accusées de pollution

Les temps sont décidément difficiles pour Coca-Cola en Inde. La polémique sur le niveau de pesticides contenu dans les boissons qu'elle produit localement est à peine retombée que la firme se trouve au cœur d'une nouvelle campagne. Et cette bataille pourrait bien devenir, pour les organisations non gouvernementales (ONG) internationales, le symbole de leur lutte contre les multinationales qui pillent et polluent, accusent-elles, les ressources en eau des communautés villageoises.

Le Forum social mondial de Bombay était évidemment une occasion idéale pour braquer les projecteurs sur le différend qui oppose Coca-Cola aux habitants du village de Plachimada, dans l'Etat du Kerala, depuis près de deux ans. Une vingtaine d'activistes, parmi lesquels le leader de la Confédération paysanne José Bové, Maude Barlow, du Conseil des Canadiens et, côté indien, Vandana Shiva du mouvement Navdanya, devaient se rendre, mercredi 21 janvier, dans le village de Plachimada, en signe de soutien. Le Mouvement mondial contre la privatisation de l'eau a déjà prévenu qu'il relaierait cette campagne dans les soixante pays où il est présent.

De quoi s'agit-il ? La firme américaine installée à Plachimada depuis 2001 pour y embouteiller ses principaux sodas (Coca-cola, Sprite, Fanta) est accusée de puiser abusivement dans les nappes phréatiques et de rejeter des eaux polluées. Les villageois sont ainsi privés d'eau pour leur usage domestique et pour leurs champs.

Plachimada compte environ 1 500 familles appartenant en majorité à la catégorie des tribaux ou des dalits (les "intouchables"). Très peu d'entre elles ont profité des 350 emplois environ créés par l'arrivée de Coca. Les plus riches ont une petite parcelle de terrain où ils produisent du riz, de la noix de coco et des légumes destinés pour l'essentiel à leur consommation. Beaucoup sont simplement ouvriers agricoles ou exercent à la journée de petits métiers de coolies, bûcherons.

"DU MAL A RESPIRER"

"Une dizaine de mois après le démarrage de l'usine, nous avons commencé à remarquer des changements dans la qualité de l'eau", explique en hindi Veloor Swaminathan qui coordonne le comité anti-Coca-Cola. "Nous avons commencé à avoir des problèmes de peau, nous avions du mal à respirer et il a fallu s'éloigner à deux kilomètres du village pour trouver de l'eau potable", ajoute une femme, elle aussi venue à Bombay pour faire connaître son histoire.

Un mouvement de protestation a débuté, avec des manifestations quotidiennes pour demander la fermeture de l'usine et des compensations pour le préjudice causé. Il n'a pas cessé depuis avril 2002. Le village a reçu le soutien de nombreuses ONG indiennes dont, parmi les plus connues, celle de Medha Patkar du mouvement Narmada.

Plusieurs études ont été réalisées, explique Veloor Swaminathan, et toutes concluent à la présence de métaux toxiques à un niveau anormalement élevé. Il met notamment en avant celle réalisée avec l'aide de journalistes de la BBC. Les analyses faites auraient ainsi montré des traces anormales de plomb et de cadmium.

Face à cette mobilisation croissante, le gouvernement local, qui avait accordé en 2000 une licence permettant à Coca-Cola de s'installer, a décidé de ne pas renouveler son autorisation le 7 avril 2003. L'entreprise a déposé une requête devant la haute cour du Kerala qui n'a toujours pas tranché. En revanche, la cour vient de donner satisfaction aux paysans en imposant à la multinationale, dans un arrêt rendu fin décembre, de réduire le pompage sur la nappe phréatique.

RISQUE D'AFFRONTEMENT

"Le gouvernement local qui a pris position pour les villageois de Plachimada se trouve confronté au pouvoir central qui, à l'inverse, souhaite conforter Coca-Cola", estime Ajit Muricken, également engagé dans la campagne et membre organisateur du Forum de Bombay. "A un moment où le gouvernement veut envoyer des signaux positifs aux investisseurs étrangers, il ne veut pas assumer le risque d'un affrontement avec une multinationale aussi puissante", poursuit-il.

Plachimada n'est pourtant pas le seul cas de plainte suscité par Coca-Cola pour des raisons identiques. Il y a quelques mois, des mouvements environnementalistes ont organisé une manifestation devant une usine de la firme, à Mehdigany, dans le nord du pays. A la suite de cette protestation, l'administration a ordonné l'ouverture d'une enquête sur les activités de l'entreprise.

Joint par téléphone, mardi à Delhi, le porte-parole de Coca-Cola en Inde, Sunil Gupta, n'a pas souhaité répondre à nos questions.

Laurence Caramel

lemonde

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